Photo perso… Soleil à Mers-les-Bains, décembre 2025
« Gardons l’espoir malgré les sombres nuées : la Lumière revient toujours »
En ce dimanche 21 décembre, un événement qui me réjouit chaque année… Les jours vont rallonger, enfin. Pour les explications scientifiques, je vous renvoie aux innombrables articles présents sur le net… Pour ma part, je me suis intéressée aux festivités autour de ce solstice, et, cette fois, je vous emmène dans les Andes.
Les Incas fêtent le « Soleil enfant », ou « Renaissance du Soleil » (je ne parle pas quechua, et ai donc dû m’appuyer sur des sources, qui divergent) : Wawa Inti Raymi.
Représentation de la cosmologie des Incas, d’après Juan de Santa Cruz Pachacuti Yamqui Salcamayhua (1613), reproduisant un dessin présent dans le temple du soleil Qurikancha à Cuzco, avec Inti (le Soleil), Killa (la Lune), Pachamama (la mère-terre), Mama Qucha (mère de la mer), et Chacana (la croix du Sud) avec Saramama (la mère du grain) et Kukamama (la mère de la Coca).
Inti, c’est le dieu du soleil, comme vous le voyez ci-dessus, sur cette image extraite d’un diaporama sur la religion inca, héliolâtre (adoration du soleil). Un temple est dédié au Dieu-Soleil à Cuzco, dans la forteresse de Sacsayhuamán (Aigle Royal), que l’on voit à gauche de cette gravure.
« L’empereur se tenait au centre et le peuple tout autour. Tous attendaient ainsi le lever du soleil ensemble. Dans le même temps, ils effectuaient des offrandes et des rites. Puis ils se dirigeaient vers le Temple du Soleil. » (source).
Cette fête fut célébrée jusqu’en 1535, puis interdite par les Espagnols en tant que blasphématoire. Cependant son souvenir perdure à travers l’art andin.
Vous voyez où je veux en venir… Célébrons donc le Solstice et la Renaissance du Soleil !
Nous en étions resté-e-s, dans le précédent article, au début des années 30… et vous vous doutez que cela va se gâter, pour tout le monde, et encore plus pour la galeriste issue d’une famille juive alsacienne…
Mais revenons en 1933, date à laquelle elle publie une autobiographie, ou plutôt une histoire de sa galerie. Enfin, un peu des deux…
Des artistes qu’elle a aidés y trouvent l’occasion de lui exprimer leur reconnaissance :
J’ai eu la chance de trouver sur un site une liste des artistes qu’elle a soutenus, avant qu’ils ne soient célèbres, voire même reconnus. Merci à son auteur, à qui je dois aussi le plan que je m’apprêtais à faire… Son blog, soit dit en passant, a été récompensé en tant que meilleur blog d’un étranger en France…
L’année suivant la parution de l’ouvrage, la galerie déménage à nouveau. Mais, cette fois, elle quitte les 18ème et 9ème pour le centre de Paris : la rue Saint Dominique. C’est sa quatrième adresse. Ce sera la dernière, car elle va devoir fermer en 1940.
Jusqu’au bout elle aura trouvé, encouragé, aidé, des artistes. Dont de nombreuses femmes. La liste en est impressionnante! Parmi elles, son amie, dont j’ai déjà évoqué le nom dans le premier article de cette série : Emilie Charmy, née Emilie Espérance Barret, dans une famille bourgeoise d’origine alsacienne, elle aussi. C’est au Salon des Indépendants qu’elle sera remarquée par Berthe, qui l’introduira dans une exposition collective en 1906. Voici son auto-portrait cette même année.
Piana Corsica, Emilie Charmy, 1906
Avec sa galerie, Berthe perd son logement. Mais elle a des ami-e-s. C’est sans doute ce qui l’a sauvée pendant la guerre (je ne suis pas parvenue à savoir ce qu’elle avait fait durant cette période). C’est, quoi qu’il en soit, ce qui va lui permettre de survivre à la misère. En 1946, une vente est organisée à son profit. 46 artistes qu’elle a soutenus vendent 80 oeuvres. Car ce n’est pas la Légion d’Honneur reçue en 1948 qui la nourrit! Elle vit alors dans une maison de retraite, à l’Isle Adam. Mais c’est à son domicile, rue Saint Dominique, qu’elle décède en avril 1951. Une triste fin de vie, mais éclairée par l’amitié, la reconnaissance et la solidarité…
Je n’ai pas lu cet ouvrage qui vient de paraître, mais il me semble intéressant. Vous pouvez aussi en savoir davantage en regardant les vidéos sur le site du Musée de l’Orangerie. Bonne découverte, à votre tour!
« Le 3 décembre 1917, Modigliani inaugure sa première (et dernière) exposition solo grâce à l’audacieuse Berthe Weill, qui a décidé de présenter 32 de ses œuvres dans sa galerie parisienne. Mais la police interrompt brutalement le vernissage et ordonne la fermeture de l’événement. Ses nus aux couleurs chaudes, dont certains affichent une toison pubienne, seraient coupables d’outrage à la pudeur ! L’exposition rouvre sans les toiles incriminées et l’artiste ne fait pas une seule vente. Un comble quand on sait que l’un des tableaux censurés, Nu couché, sera adjugé 170,4 millions de dollars chez Christie’s en 2015, rejoignant les records de l’histoire des enchères… »
Voici le tableau saisi pour « outrage aux moeurs »!
Amedeo Modigliani, 1916, Reclining Nude (Nu couché), oil on canvas, 65.5 x 87 cm, Foundation E.G. Bührle
Vous avez peut-être remarqué l’adresse sur l’affiche. Ce n’est plus le 25, rue Victor Massé, mais le 50, rue Taitbout. En effet, jusqu’alors, elle ne disposait que de six mètres de cimaise pour accrocher les oeuvres. Vu le succès grandissant de sa galerie, il lui fallait plus d’espace. Elle déménagea donc alors pour cette adresse.
Et voici, à cette époque, un portrait de l’artiste qui finira sa courte vie trois ans plus tard, en 1920.
1920, c’est aussi l’année de la migration de la galerie vers le 46, rue Lafitte. Pas très loin, et toujours dans le 9ème arrondissement. Pas un hasard, ce choix. Elle connaissait bien les lieux qui, quelques années plus tôt, abritaient la galerie de Clovis Sagot.
Les deux galeristes avaient des points communs, dont la découverte de « jeunes » artistes. Mais, d’après mes lectures, l’une était visiblement moins « commerçante » que l’autre.
« Picasso avait quitté la galerie de Berthe Weill en 1903 pour – selon les termes de cette dernière – trouver Sagot. En 1909, il s’en éloigne à son tour, afin de travailler avec ces autres marchands, plus reconnus et aux stratégies commerciales plus sûres. Lors de l’importante exposition «Manet and the Post-Impressionists» aux Grafton Galleries de Londres en novembre 1910 – janvier 1911, c’est néanmoins Sagot qui y envoie le plus grand nombre d’oeuvres de Picasso. » (source)
En 1909, Picasso aurait fait le portrait du marchand d’art à partir de la photo suivante.
Bref, trêve de divagations, Berthe Weill s’installe au 46 rue Laffitte, voie parisienne particulièrement marquée par les beaux-arts, mais aussi la littérature (Proust…), le théâtre (Sarah Bernard), bref, la société culturelle mais aussi politique d’alors. Pas de photo actuelle de l’immeuble, car le 46 est devenu… « Le 46 », un restaurant! Mais une photo un peu plus ancienne (source).
Je ne résiste pas à l’envie de partager avec vous cette étude, où l’auteur avoue ne pas savoir où se situait la galerie de Berthe (passage en gras). La liste est impressionnante!
« N°2 : Antoine BAER, qui vend ses tableaux au rez-de-chaussée de la maison de Sir Richard Wallace.
-N°3 : Galerie BRAME, spécialiste de Corot et plus tard de Degas aussi. Hector Brame s’était d’abord associé avec Durand-Ruel.
-N°5 : Galerie MOUREAUX, dont nous ne connaissons pas l’orientation artistique faute d’archives.
-N°6 : Ambroise VOLLARD s’était d’abord installé ici, avant d’ouvrir une galerie plus grande au N°39/41.
-N°8 : Alexandre BERNHEIM dit Bernheim-Jeune, de 1863 à 1906 ; il fut un des grands défenseurs des impressionnistes Monet et Renoir. Une des plus importantes expositions Van Gogh a eu lieu dans ses murs. Bernheim vend aussi Seurat, Bonnard et Matisse.
-N°10 : Adolphe BEUGNIET qui présente depuis 1848 des tableaux et aquarelles d’artistes importants comme Delacroix et plus tard – dans les années 1880 – Degas.
-N°12 : Alexis FEBURE, le premier marchand de tableaux de Manet.
-N°15 – dans les bâtiments sur rue de l’hôtel S.Rothschild : Galerie WEYLE qui malgré l’emplacement prestigieux est restée dans l’ombre de ses voisins.
-N°16 : DURAND-RUEL, sans doute avec Bernheim le marchand le plus important, mais qui reste à cette adresse où il s’était installé en 1870 jusqu’en 1920. Durand-Ruel a organisé la plupart des grandes expositions des impressionnistes, avec notamment Monet, Renoir, Pissarro, Sisley, et avait une renommée mondiale. Après 1920 il n’y avait que le siège new-yorkais qui a survécu jusqu’en 1950.
-N°20 : Simon CAHEN, spécialistes de tableaux « modernes » des années 1880.
-N°22 : Alphonse LEGRAND qui a – sans beaucoup de succès – essayé de vendre des tableaux de Caillebotte.
-N°27 : Alexis-Eugène DETRIMONT qui vend aussi des cadres, comme beaucoup de ses collègues. Detrimont siégeait d’abord au N°33 où il s’était fait une réputation comme marchand de tableaux de paysage, en particulier de Daubigny. Il présentait aussi Courbet. En 1886 il s’installe à la place de la galerie Louis LATOUCHE qui avait vendu des Monet et des Pissarro.
-N°28 : Galerie Gustave TEMPELAERE, une galerie mineure.
-N°38 : Galerie BOURDEL, galerie du second plan.
-N°39/41 : La galerie de VOLLARD où Cézanne était à l’honneur. Ambroise Vollard a sans aucun doute créé la célébrité de cet artiste, comme il l’a fait pour d’autres comme Picasso qui a peint un portrait cubiste du marchand qui était aussi écrivain à ses heures.
-N°43 : Galerie CARMENTRON qui a présenté des œuvres de Whistler. A la même adresse il y a eu aussi la galerie DIOT (vente d’aquarelles).
-N°46 : Clovis SAGOT, au début du XXe siècle un des principaux marchands (et grand ami) de Picasso, mais aussi de Gris, Léger, Lhote, Laurencin, Gleizes, Metzinger,…
-N°47 : Galerie GUERIN, comme son collègue Cahen (N°20) spécialiste de tableaux « modernes »
-N°52 : Pierre Firmin Ferdinand MARTIN dit le père Martin, le marchand des peintres de Barbizon et ensuite de plusieurs impressionnistes autour de 1874. Pissarro a été inscrit un temps à son adresse. Un des rares marchands de tableaux (avec Vollard, un peu plus tard) à avoir une nette position politique à gauche, voire anarchisante. Pour l’instant nous ne connaissons pas l’adresse exacte de quelques autres galeries importantes qui avaient leur siège dans la rue Laffitte à un moment ou un autre. Par exemple Berthe WEILL qui y était de 1919 à 1926 et présentait Picasso, Picabia, Dufy, mais aussi Rouault et Van Dongen … Ou la galerie TENDANCES NOUVELLES, dont Kandinsky était l’artiste le plus célèbre. Maurice GOBIN vendait jusqu’au début des années 1950 des estampes d’artistes modernes, dont Derain. Louise Abbéma a été le cœur artistique de cette rue, puisqu’elle y vivait. Les autres artistes, peintres surtout, ne faisaient qu’y passer pour aller chez leurs marchands de tableaux. Mais déjà cela a fait que la rue Laffitte ait sa place dans l’histoire de l’art français.
En 1920, Berthe Weill imagine de regrouper en une exposition un « Groupe éclectique : Fauves, cubistes et post-cubistes ». Trois générations d’artistes, dont beaucoup avaient débuté dans sa galerie. Parmi eux, Alexander Archipenko.
Parmi les artistes que soutient Berthe Weill, Alice Halicka, à qui elle consacre une présentation personnelle en 1922.
Le trentenaire de la galerie est visiblement l’occasion de joyeuses festivités…
Vous devinez que la galerie va connaître d’autres aventures… que j’évoquerai dans un troisième (et, promis, dernier) article…
Je dois bien l’avouer : je n’avais jamais entendu parler de cette artiste, et l’idée d’aller voir cette exposition ne m’est pas venue spontanément. D’autant que l’affiche n’était guère attrayante! Jugez-en vous-même!
Un nouvel aveu s’impose : j’ai été subjuguée par la force et la beauté de son oeuvre. Et le personnage m’a vraiment intriguée… Dès l’affiche, à vrai dire : que signifiait « Galeriste d’avant-garde »? Et pourquoi ce parti-pris d’un fond rose très « fifille ». Connotation totalement antinomique avec le portrait (dont j’ai appris par la suite qu’il est dû à son amie Emilie Charmy, qui ne l’a pas flattée!) très sombre, que seul éclaire un visage emprunt de finesse, avec un regard pétillant derrière les bésicles et un sourire en coin dont on ne sait s’il faut l’interpréter comme charmeur ou moqueur… La voici en photo, avec la famille Lévy, aux alentours de 1900 (au centre en bas).
Une volonté affirmée de s’installer comme galeriste, à une époque où les hommes dominaient dans ce métier. Elle avait d’abord ouvert une boutique en lien avec sa formation auprès d’un marchand d’estampes, Salvator Mayer, chez qui elle était entrée en apprentissage lors de son arrivée à Paris, depuis son Alsace natale. Mais très vite elle décida de devenir galeriste, avec un objectif précis : sortir des sentiers battus, et notamment de la tradition académique, et faire découvrir des peintres « d’avant-garde ». Nous sommes en 1901, elle a à peine 36 ans. Voici ce qu’elle en dit dans son autobiographie écrite en 1933.
L’adresse – 25, rue Victor Massé, dans le 9ème, a déjà une histoire, dans les Beaux-Arts : ce fut celle d’un certain Théo, qui y a abrité de 1886 à 1888 son frère Vincent… Ci-dessous, la « Vue depuis la fenêtre » qu’a peinte ce dernier à cette époque.
Petite parenthèse : si cette période vous intéresse, je vous conseille un article en ligne sur le site Paris la Douce, auquel j’ai emprunté cette reproduction. Mais revenons à Berthe, au talent d’inventeure, dans le sens profond du terme : celle qui découvre. Et pas n’importe qui : parmi les premiers artistes exposés, un jeune inconnu, Picasso!
Je n’ai pas choisi le Moulin de la Galette, plus connu, mais une autre toile de l’artiste, que je n’avais jamais vue, et qui a suscité en moi des émotions similaires à celles que je ressens devant certains tableaux de Chagall…
Elle a aussi été fait largement la promotion de Toulouse-Lautrec.
Ses réseaux lui permettent d’aller plus avant, de découvrir, encore et encore. Pourtant, elle ne ménage pas ceux à qui elle a affaire!
La liste de ces artistes plus ou moins (in)connus qu’elle a accueillis, encouragés, et dont elle a assuré la promotion commerciale est telle que je renonce à vous la transmettre. Vous la lirez aisément sur les nombreux articles et dans les livres qui lui sont consacrés. Le terme « artistes » a été choisi, car on trouve parmi les productions exposées des objets. J’en ai sélectionné pour vous deux qui ont attiré mon attention sur Paco Durrio.
Vous ne le connaissiez pas non plus? En cherchant à en savoir davantage sur ce sculpteur, je l’ai trouvé représenté par… Gauguin, guitare à la main.
Elle ne s’intéresse pas qu’aux Beaux-Arts… L’électricité éclaire sa galerie dès 1908, avant les grands travaux qui succédèrent à la crue de 1910. Elle fut la première de sa rue à passer du gaz à l’électricité… Autre signe de modernisme, qui, allié au rejet des contraintes et des normes, en font une personne étonnante et si « séduisante »…
A la suite de la représentation de cette adaptation de la pièce de Yasmina Réza, je me suis questionnée sur le nom de l’artiste imaginaire (discutable… peut-être un condensé d’artistes) qui serait l’auteur-e du tableau autour duquel tourne une grande partie de l’intrigue : Antrios. Juste par curiosité. Juste pour m’amuser. J’ai envie de vous présenter aujourd’hui le fruit de mes réflexions. En toute modestie. Sans prétention aucune. Simplement parce que je me suis dit que la pièce pouvait/pourrait aussi être vue autrement…
Le mot ne semble pas exister. Je suis prudente, car je ne lis pas tous les alphabets! J’ai donc cherché à en identifier les connotations possibles.
1. Proximité avec une grande figure de l’Antiquité grecque : Anteros
Le nom a deux connotations en grec ancien : d’une part, antíos qui désigne un opposé, un contraire, et d’autre part Ἀντέρως (Antéros, l’anti-Eros), terme constitué de « Eros » et « anti », soit le contraire d’Eros, d’où l’idée d’ « Amour retourné ». Selon une version, il serait fils d’Arès (dieu de la guerre, entre autres) et d’Aphrodite (déesse de l’amour). Logique, comme « contraire » ! Selon une autre version, il aurait été engendré par Poséidon et un frère des Néréides.
Version 1 : évocation des géniteurs
C’est Pausanias qui en parle le premier, mais on le retrouve, tant dans la littérature grecque que dans la littérature romaine, chez de nombreux auteurs.
Pausanias, Description de la Grèce 1. 30. 1 (trad. Jones) (récit de voyage grec, IIe siècle ap. J.-C.) : « Devant l’entrée de l’Académie [en dehors d’Athènes] se trouve un autel à Éros (Amour), avec une inscription selon laquelle Charmos fut le premier Athénien à dédier un autel à ce dieu. L’autel dans la ville appelé l’autel d’Antéros (Amour vengé), disent-ils, a été dédié par des étrangers résidents, parce que l’Athénien Meles, dédaignant l’amour de Timagoras, un étranger résident, lui ordonna de monter au point le plus élevé du rocher et de se jeter. Lorsque Meles vit que Timagoras était mort, il souffrit de tels remords qu’il se jeta du même rocher et mourut ainsi. À partir de ce moment, les étrangers résidents adorèrent Antéros comme l’esprit vengeur de Timagoras. »
Pausanias, Description de la Grèce 6. 23. 5 : « Dans l’une des palestres [dans la ville d’Élis] se trouve un relief montrant Éros (Amour) et Antéros (Amour rendu), comme on l’appelle. Éros tient une branche de palmier, et Antéros essaie de lui prendre la palme. »
Ovide, Fastes 6. 90 (trad. Frazer) (poésie romaine, Ier siècle av. J.-C. au Ier siècle ap. J.-C.) : « ‘Ô [Vénus-Aphrodite] gracieuse Mère des deux Cupides (Amours) [c’est-à-dire Éros et Antéros],’ dis-je, ‘accorde-moi ta faveur.’ La déesse regarda le poète. »
Fresque de Pompéi : Aphrodite et les deux jumeaux (source)
Cicéron, De Natura Deorum 3. 21 (trad. Rackham) (rhétoricien romain, Ier siècle av. J.-C.) : « Le troisième [Cupidon-Éros], qui est le même qu’Antéros, [fils] de Mars [Arès] et de la troisième Vénus [Aphrodite]. »
Sénèque, Phèdre 274 et suiv. (trad. Miller) (tragédie romaine, Ier siècle ap. J.-C.) : « Toi déesse [Aphrodite], née de la mer cruelle, que l’on appelle mère des deux Cupides (Amours) [c’est-à-dire Éros et Antéros], ce garçon espiègle et souriant. »
Nonnos, Dionysiaques 47. 332 et suiv. (trad. Rouse) (épopée grecque, Ve siècle ap. J.-C.) : « [Ariane se lamente après avoir été abandonnée par Thésée sur l’île de Naxos :] ‘Les images mêmes d’Éros (Amour) et d’Antéros (Amour rendu) sont-elles jalouses de moi ? Car j’ai vu une vision délicieuse de mariage accompli dans un rêve trompeur, et le beau Thésée était parti.’ »
Version 1 : symbolisme
Platon le met en scène dans le Phèdre. Socrate parle de l’amour entre un éromène et un éraste.
« Mais, tout comme celui qui de quelque autre a pris une ophtalmie est hors d’état de prétexter une cause à son mal, lui, il ne se doute pas qu’en celui qui l’aime, c’est lui-même qu’il voit, comme en un miroir : en sa présence, la cessation de ses souffrances se confond avec la cessation des souffrances de l’autre ; en son absence, le regret qu’il éprouve et celui qu’il inspire se confondent encore : en possession d’un contre-amour (antéros) qui est une image réfléchie d’amour. »
« Platon, Phèdre 255d (trad. Lamb) (philosophe grec, IVe siècle av. J.-C.) : « Lorsqu’il est avec l’amant, tous deux cessent de souffrir, mais lorsqu’il est absent, il languit comme on languit après lui, et il a l’image de l’amour, Antéros (amour contre amour) qui loge en son sein, qu’il appelle et croit être non pas amour mais amitié seulement, et son désir est comme le désir de l’autre, mais plus faible ; il veut le voir, le toucher, l’embrasser, et probablement peu de temps après son désir est accompli. »
Version 2
Il serait fils de Poséidon et Néritès, frère des Néréides.
Élien, Sur les animaux 14. 28 (trad. Scholfield) (histoire naturelle grecque, IIe siècle ap. J.-C.)
« Poséidon était l’amant de Nérides [fils de Nérée], et que Nérides lui rendait son amour, et que c’était l’origine du célèbre Antéros (Amour mutuel). »
2. L’Anteros des astrologues
« A cette période, l’Astéroïde 1943 Anteros faisait partie de la « liste critique ». Sa position était considérée comme « mal connue ». Par une série de prises de vues, nous avons mesuré ses positions (sur chaque image séparément). Les positions obtenues ont été communiquées au Minor Planet Center MPC.
A droite, figure un compositage de la série d’images. l’Astéroïde qui se déplace rapidement sur le fond des étoiles est bien visible aux positions 1, 2, 3 et 4 (respectivement au moment de la prise de vue des quatre images). Sur la gauche, figure le résultat de la réduction astrométrique en mode automatique de notre logiciel de traitement d’image TRIMASS. » (Source : David Romeuf)
(1943) Antéros est un astéroïde Amor, découvert le 13 mars 1973 par James B. Gibson au complejo Astronómico El Leoncito, en Argentine.
La symbolique de l’Etre Humain dans toutes ses dimensions
Contrairement à la vision divine ou à l’image d’un corps céleste, nous voici redescendus sur Terre, avec la racine du terme « anthropos ».
Source : Romain Garnier. Nouvelles réflexions étymologiques autour du grec νθρωπoς.
En ce sens, les trois personnages seraient typiques de la race humaine… mais je ne vois pas pourquoi Réza aurait transformé le théta en tau…
Une autre connotation : l’entrisme
Homophones, mais pas homographes : les deux racines peuvent se confondre dans un théâtre !
« Tactique consistant à s’introduire dans une organisation, un parti, pour en infléchir l’orientation. »
Telle est la définition du CNRTL… Je vous laisse transposer dans le contexte de la pièce…
3. Une dernière proximité, homophone et homographe : l’antre
Pas besoin de longs discours, pour évoquer l’antre dans toutes ses dimensions, physiques comme symboliques.
En antithèse totale du blanc, tant physiquement que symboliquement !
Synthèse
Le nom est connoté, pour des hellénistes ou amateurs/trices de l’Antiquité grecque, à deux filiations : d’une part à l’amour homosexuel, et d’autre part à une idée de « retour », tantôt dans le sens qu’il prend dans l’expression « en retour », tantôt dans le sens de « contraire ». Dans la mythologie, le couple Eros / Anteros est riche d’interprétations. La littérature s’en est emparée avec l’antérotisme… Et la psychanalyse n’est pas en reste (Source).
Il s’agit dès lors de questionner la dynamique du groupe social d’appartenance de chaque personnage, mais aussi celle du trio d’amis. Amis? Amants? Amoureux? Les femmes sont bien absentes de la pièce, à l’exception de celle que va épouser, sans enthousiasme, Yvan…
Questionner le « groupe », c’est aussi ce qu’évoque la connotation à l’entrisme. Le lien possible avec l’anthropisme, lui, suggère plutôt l’opposition humains / divins, l’artiste étant soit médiateur soit « entre les deux » et parfois victime de cette non- ou bi- appartenance.
Enfin, l’antithèse antre/noirceur, clarté/blancheur est si évidente qu’elle ne peut que résonner en chacun-e des spectateurs/trices…
Pour les hellénistes, le choix de la connotation sera lié à la prononciation des acteurs. En effet, dans un cas il s’agit d’un omicron (o ouvert et léger), alors que dans le second c’est un oméga (o fermé et grave)… C’est donc la manière de prononcer « Antrios » qui oriente vers telle ou telle connotation…
J’avais eu l’occasion, voici quelques années, de voir jouer Arditi, Vanneck et Luchini dans la pièce de Yasmina Reza, « Art ».
Je ne vous donnerai pas la date, mais c’était avant le Covid, entre 1995 et 1998. Une pièce qui m’avait séduite, et vous reconnaîtrez que le trio était impressionnant. Si vous le souhaitez, vous pouvez la voir intégralement sur YouTube, elle est en ligne. C’est intéressant à deux titres : la pièce, certes, mais aussi les acteurs encore jeunes… Certains l’ont rejouée depuis, et elle est encore souvent à l’affiche…
En ce mois de novembre 2025, c’est une troupe d’amateurs qui l’interprétaient pour la première fois. Eux sont de vrais amateurs – j’allais ajouter « éclairés, certes », car ce qualificatif leur irait bien. Mais la metteure en scène est une vraie professionnelle. Et j’ai admiré ce qu’elle a pu tirer d’une salle des plus ordinaires (un rez-de-chaussée d’immeuble) où les spectateurs, assis sur des chaises pliantes, étaient au même niveau que les acteurs. Certes, l’auteur avait indiqué la nécessaire sobriété des décors, mais la petite troupe éphémère a réussi, avec des éléments sortis des demeures de chacun, à nous transporter de lieu en lieu. Car on est tantôt chez Serge, le riche collectionneur qui s’est offert le tableau, chez Marc, l’ingénieur en aéronautique, l’adepte du bon vieux temps, et chez Yvan, la « cigale » qui va épouser la fille d’un papetier pour qui il est « représentant de commerce ». Le « marqueur » des lieux? Un seul indice. Un tableau, justement… des plus classiques… voire une « croûte » comme le qualifie le texte.
« « Le salon d’un appartement. / Un seul décor. / Le plus dépouillé, le plus neutre possible. / Les scènes se déroulent successivement chez Serge, Yvan et Marc. / Rien ne change, sauf l’œuvre de peinture exposée. »
Reconnaissez que c’est une belle gageure que d’oser se produire dans de telles conditions! Eh bien, le challenge a été réussi! Et les spectateurs/trices étaient enchanté-e-s de ce spectacle au rythme soutenu… et ébahi-e-s, il faut le dire, devant la performance de chacun. Le célèbre monologue de Marc notamment! Brillamment interprété, sans trou ni hésitation… emportant le spectateur dans les dédales des pensées et ressentis de celui qui m’a fait penser au clown blanc, vous savez, celui qui fait rire mais qui ne parvient pas à être heureux? « . Comme le dit le personnage :
« Je ne suis pas content mais d’une manière générale, je ne suis pas un garçon qui peut dire, je suis content. »
Mais chaque acteur méritait amplement les félicitations de la cinquantaine de personnes présentes, dont des spécialistes et des élus du coin (peu, trop peu!). Et le fait que deux d’entre eux aient largement dépassé la quarantaine que sont censés avoir les héros n’a absolument pas gêné. J’avoue m’être posée la question : « qu’est-ce qui pousse des personnes déjà très occupées par leur vie professionnelle, amicale, personnelle et familiale à apprendre un texte que l’aspect volontairement « ordinaire », du point de vue du langage, rend difficile à mémoriser? Et j’ai été heureuse de faire la connaissance de celle qui les avait suivis dans cette aventure (ils avaient choisi la pièce) et entraînés, coachés, formés, tout en la mettant en scène dans les conditions décrites ci-dessus. Elle m’a demandé de ne pas la citer, mais je peux dire qu’elle est très engagée dans l’accompagnement de personnes qui ont envie ou besoin de s’investir ou se détendre, avec le yoga, le rire et le théâtre. Le texte qui suit est extrait de son site.
« VENEZ RENCONTRER L’ARTISTE QUI SOMMEILLE EN VOUS ET LE PARTAGER AVEC LES AUTRES. A partir de jeux et exercices d’entraînement du comédien, vous développez votre conscience du corps, de la voix et activez votre qualité de présence. Vous stimulez votre imaginaire, votre créativité et l’expression de votre personnalité sur la scène comme dans la vie. »
C’est exactement ce qui a été vécu ce soir-là. Un véritable « partage » permis par la passion d’une artiste et de trois amateurs, soutenus par des réseaux familiaux et amicaux… Une vraie « bulle » loin du quotidien… Et, si la fin de la pièce reste ambigüe (l’amitié survit-elle à ces « déballages », comme disait ma grand-mère?), le devenir de la troupe ne l’est pas : un élan commun entre les acteurs, entre eux et leur professeure, et entre l’ensemble et celles et ceux qui ont eu le plaisir d’assister à ce qui, espérons-le, était une « première ». Reste à trouver les lieux qui pourront les accueillir, les financements qui permettront de poursuivre l’aventure, les soutiens artistiques et politiques (au sens large) qui donneront à d’autres le même plaisir partagé… Si vous avez des idées, placez-les en commentaires de cet article, les idées leur seront transmises…
Je n’aurais personnellement pas choisi spontanément d’aller voir David, car il ne fait pas partie de mes peintres préférés. Mais comme j’y étais invitée… direction donc Le Louvre en cet après-midi froid et gris. Et les premiers tableaux ont bien failli me faire abandonner. Vous savez, ces oeuvres gigantesques qui débordent de relents de bravoure et de scènes de carnage? Mais heureusement, j’ai continué, et j’ai découvert d’autres versants de son oeuvre, dont certains m’ont intéressée, à défaut de me séduire. A mon habitude, donc, loin d’une critique experte ou hardie, je vais focaliser sur quelques points de cette exposition qui ont retenu mon attention.
Les portraits
En bonne béotienne que je suis, j’ignorais que David avait peint des portraits autres que ceux des célébrités. Je dirais même « un nombre non négligeable de portraits », voire d’auto-portraits. En voici quelques échantillons… Ce qui a attiré mon attention, c’est l’originalité des visages, moins « inexpressifs » que chez beaucoup d’artistes de cette époque.
Les femmes notamment ont souvent l’air épanoui, voire un peu « canaille »…
Les détails
Ce qui m’a saisie, entre autres, est le sens du détail, même sur des toiles de dimensions impressionnantes. Qu’il s’agisse de passementerie, de crinières ou chevelures, ou de clins d’oeil à l’Histoire sous forme de gravures rupestres inédites…
Focalisation sur les seins
Dans les dernières salles de l’exposition, j’ai été surprise par le nombre de seins dénudés dans des tableaux où leur exhibition n’était pas toujours nécessaire. Appétence d’un homme vieillissant ou intérêt purement esthétique?
Un condensé de domination masculine !
Une thématique redondante : des femmes agenouillées devant des condensés de virilité, qu’ils soient guerriers ou divins… Qu’elles soient âgées, mères ou sans doute maîtresses (à en juger par la tête d’Héra !), elles se prosternent devant le Mâle…
Je finirai par un tableau qui m’a particulièrement séduite, et me « parle » beaucoup. Je me tais et vous laisse le découvrir…
J’avais voulu intituler cette série « restaurants luzéens ». Je me suis aperçue d’une erreur : l’adjectif s’écrit « luziens »! J’ai ensuite voulu le traduire en basque. « Restaurant » se dirait, d’après le net, « jatextea ». Et Luzien? « Donibandar ». Mais, pour le premier, je ne sais pas si cela désigne n’importe quel type de restaurant! Et, pour le second, c’est certes le gentilé, mais ce terme peut-il devenir adjectif, rapporté à un objet??? J’ai donc supprimé l’intitulé, pour ne garder que le nom des commerces. Après le Bar Basque, c’est au tour du Pil Pil Enea aujourd’hui. Continuons nos escapades linguistiques : « pilpil », c’est une « façon de cuire quelques poissons typiques du Pays Basque qui est fait avec de l’huile, du piment et de l’ail, dans une casserole d’argile, et servi bouillant » (source). On s’attend donc à ce qu’ « enea » désigne un poisson, n’est-ce pas? Eh bien, non. J’ai utilisé le traducteur Itzuli pour rechercher les noms de différents poissons… en vain! « Enea », c’est un terme pour désigner une maison, avec la connotation d’ambiance chaleureuse et d’ancrage familial.
Pour découvrir ce restaurant, il faut être bien informé : sa devanture est étroite, et il est situé dans une petite rue à l’écart de la plage, du port et du centre ville. Pour ma part, ce fut le résultat d’une recherche sur le net un soir où de nombreux autres étaient fermés. Encore fallut-il ensuite trouver l’adresse! Et j’ai compris pourquoi il ne communique pas davantage : il est comble tous les jours… Sa renommée est telle qu’il ne désemplit pas, et j’avais bien fait de réserver! Et j’ai compris pourquoi. Si vous voulez réussir la triangulation « accueil chaleureux », « ambiance conviviale » et « excellents plats », c’est là qu’il faut aller.
J’ai été tellement absorbée par la conversation de l’hôte et la dégustation que j’ai oublié de faire des photos de l’intérieur et que je n’ai pensé à prendre celle du plat principal qu’après avoir commencé à manger la morue!
Quant au dessert et au vin, le Txacoli qui s’imposait, vous n’en verrez rien!
« Avec son grand-père patron pêcheur et sa grand-mère gérante d’une pension de famille, c’est tout naturellement qu’Yvan se tourne vers les métiers de bouche dans un seul et unique but : créer un endroit chaleureux où le plaisir d’une bonne table se partage. Il cuisine dans son restaurant des plats traditionnels tels que la fameuse soupe de poissons de sa grand-mère mais également des plats typiques basques. Il s’approvisionne en poissons auprès des pêcheurs locaux.
Suite à sa formation en école hôtelière, Yvan part travailler en Allemagne quelque temps. Ensuite, il revient en France pour accroître son expérience dans le restaurant gastronomique d’un Relais & Châteaux situé dans le Sud-Ouest. De là, il s’oriente vers un autre type de restauration en cuisinant dans une auberge familiale à Arcangues.
Sa passion pour les produits frais du terroir et son envie de perpétuer et de préparer les recettes de sa famille, le conduit à reprendre l’ancienne pension de famille. »
Yvan est donc aux fourneaux, et c’est Nicolas qui s’occupe de la salle et des client-e-s, avec dynamisme et humour. Il s’est bien moqué de moi, notamment (mais avec bienveillance) quand j’ai demandé des couverts pour manger les tapas…
Une adresse à noter, et n’oubliez pas de réserver : il n’y a que 26 places!
J’ai annoncé le dernier article sur ma récente virée en terre basque, mais j’avais oublié mon projet d’écrire sur les restaurants découverts durant ce séjour. Je vais vous les présenter rapidement, dans l’ordre où j’y ai dîné, en commençant par le Bar Basque.
C’est une véritable « institution » de la ville, car il est plus que centenaire. Voici ce qu’en écrit le CIAP.
« Le Bar Basque était l’institution luzienne des années 1920, le premier endroit de la ville où la société mondaine se réunissait pour passer des soirées festives.
C’est en 1924 que Charles Cerutti, célèbre pour la réussite de son restaurant-dancing à Cannes et directeur du restaurant du casino de la Pergola, reprend le Bar Basque. Cet établissement connait alors un succès florissant et devient un lieu emblématique des fêtes durant les années folles. »
Vous connaissez peut-être l’histoire de la Pergola? Sinon, je vous conseille de lire ce site, très intéressant, avec, qui plus est, de nombreuses photos montrant les transformations (plus ou moins bienvenues) de celle-ci.
Je ne suis pas parvenue à trouver une photo de cet homme, venu du Sud natal pour diriger le restaurant du complexe hôtelier tout « moderne » jouxtant le casino, et qui eut l’idée de reprendre ce bar. Au fait, qui l’avait créé? Je l’ignore…
L’atmosphère est restée marquée par l’ancienneté du bar.
Un article récent narre notamment l’histoire d’oeuvres qui ornaient les murs.
« De l’immense comptoir en bois sculpté, aux belles poutres massives, son vrai plancher en bois, ses peintures dans les boiseries murales et des photos d’hier, toute une époque se reflète dans l’authenticité de son décor et des souvenirs d’une maison avançant sur son centenaire en 2024. Haut lieu de soirées luziennes, c’est aussi un voyage dans les pas d’Hemingway ou encore de Maurice Ravel qui aimaient particulièrement le non moins célèbre cocktail « Macca’B » ! Poètes, écrivains, musiciens ont couronné son histoire artistique, comme les peintures originales du peintre Benjamin Floutier. Pour la petite histoire, le spécialiste Robert Poulou a expliqué « Ce sont probablement ses plus belles œuvres, accrochées dans le bar de 1925 à 2005. Pendant quatre-vingts ans, des générations de Basques et des milliers de touristes ont pu contempler ces tableaux, lesquels ont été vendus aux enchères en 2005 ».
Voici un exemple d’un des tableaux de Louis-Benjamin Floutier, vendus aux enchères.
Les tableaux ont été vendus, la salle a été amputée, mais le bar a survécu aux difficultés, et son histoire subsiste malgré le temps, comme on le constate dans l’anecdote concernant le cocktail indiqué ci-dessus.
« Hippolyte fait à jamais partie de la fresque du Bar basque, grâce à son invention en 1946 du cocktail « Macca’B » (prononcer « macchabée »). Plusieurs alcools (« cinq-six », se bornera-t-on à nous confier), trois cerises à l’eau-de-vie et une demi-tranche d’orange, le tout rallongé au champagne. « Du Moët-et-Chandon, à l’époque », glisse Edouard Béréau. « C’est très trompeur, celui qui en boit finit généralement « bien touché ». D’où le »macca’B » », s’amuse notre mémoire du Bar. »
Bien sûr, la pelote basque n’est pas oubliée. J’ai découvert en cherchant sur le net qui était Jean Urruty, que ce que j’avais photographié est en réalité une publicité pour l’apéritif Byrrh, datant de 1953.
« Jean Urruty est très présent dans la presse depuis ses premiers titres de champion du monde. Au-delà des résultats sportifs, la presse sportive parisienne se plaît à raconter sa vie, pour en faire un personnage emblématique du paysage médiatique français.
Et c’est ainsi qu’en 1953, un curieux partenariat voit le jour avec de vin apéritif Byrrh, qui aboutit à un objet publicitaire peu usuel : une affiche reprenant la vie de Jean Urruty en bande dessinée.
Le texte est signé Gaston Bénac (1881-1968) et reprend les éléments les plus pittoresques de la vie de Jean Urruty, et il est illustré de 16 vignettes de Paul Ordner (1901-1969). On y découvre les débuts d’Urruty à Saint-Palais, ses rencontres avec le politicien Ybarnégaray, le roi d’Espagne Alphonse XIII ou Winston Churchill, ses exhibitions retentissantes à Paris, au Mexique ou en Russie, ses essais au tennis, son incarcération au camp de Rava-Ruska, sa passion pour la chasse… et l’alcool Byrrh »
On peut le voir en action sur des films de l’INA, dont celui-ci datant de 1966. Regardez le film, il est passionnant, et on y apprend beaucoup sur la pelote.
Mais revenons à cette soirée de novembre où j’ai eu l’occasion de dîner, pour la première fois, dans ce Bar Basque. Un délicieux foie gras, arrosé d’un Irouléguy, bien entendu, un Xut. Depuis, j’ai appris que « xut » était un mot signifiant « pentu, escarpé ». Mais d’autres affirment que c’est un terme de rugby, le « drop ». Si parmi mes lecteurs/lectrices il en est qui connaissent la langue, merci de m’éclairer par un commentaire!
Mes amis ont opté pour les croquettes de chipiron à l’encre.
Une adresse, donc, à découvrir absolument… Un seul regret : le manque de disponibilité du personnel, que d’autres ont signalé aussi sur Tripadvisor. Mais nous ne sommes ni Hémingway ni Ravel, et encore moins joueurs de pelote basque…